mercredi 31 mars 2010

Présentation de TORRITO AFICION à Gerena






Un acte de présentation de l’Association TORRITO AFICION aura lieu à Gerena le vendredi 16 avril.






Programme :

10h30
Finca Mirandilla, visite ganadería Marquis d’Albaserrada
“Montrer et expliquer la culture de l’élevage du taureau de combat dans son environnement naturel afin d’éduquer les visiteurs à l’essentiel de la corrida : l'animal-roi”

12h30
Hacienda El Palacio, acte officiel de présentation
Historique du Palais (Santa Coloma/Albaserrada)
Comment est née l’idée de l’Association
Philosophie, objectifs et projets de TORRITO AFICION
Liens touristiques et culturels entre la France et l’Espagne grâce au taureau de combat et à la Tauromachie
Témoignage de Fabrice Torrito, premier mayoral français d’un élevage espagnol
Conclusion de l’acte par Don Joan Mesquida, Secrétaire d’Etat Espagnol de Tourisme (sous réserve)

13h30
cocktail

Merci de confirmer votre présence à cette journée avant le 12 avril à :



mardi 30 mars 2010

Vu à Mirandilla (1)

Sangre brava

Tentadero de machos

La promptitude de Gavilán à la citation de Julio Parejo(Photo Gallardo)

Aujourd’hui, des mâles de deux ans ont été testé, dans le but de sélectionner un étalon. Quoi de plus normal que de réaliser cette épreuve un 19 mars, fête de la Saint-Joseph, fête de tous les pères d’Espagne…
Pour organiser un test de mâles, il faut des arènes, des mâles, des toreros, et de la chance.
Pour les arènes, on a ça à Mirandilla.
Pour les mâles, j’avais soigneusement retenu sept erales* qui m’intéressaient pour leur lignée génétique, leur morphotype et leurs cornes.
Pour les toreros, mon choix s’était porté sur un matador aujourd’hui retiré, qui s’est “fait” comme professionnel à Mirandilla, qui a une grande connaissance du bétail d’Albaserrada et un grand respect pour l’histoire de cette ganadería : Tomás Campuzano. Ce dernier accompagnait les deux poulains qu’il cornaque, le matador Julio Parejo et le novillero Salvador Barberán, aidés de leurs banderilleros de confiance. Le picador, évidemment fondamental pour jauger la bravoure des bêtes, était un membre de la dynastie des “Chocolate”.
Tout est en place : deux vachers au dessus des corrals pour trier rapidement le bétail, un picador, cinq toreros, chacun avec sa branche de laurier, un mayoral aux commandes, et … “que Dios reparta suerte”.
Tester les mâles à la branche de laurier, permet de ne pas “sacrifier” la bête puisque sans avoir connu le leurre de la cape, elle pourra être toréée dans un an ou deux. Si l’animal se comporte en brave dès sa sortie et lors de l’épreuve de piques, la mayoral demandera au torero de le toréer, “quemarlo” dans le jargon. Cette décision est sans retour possible: le taureau sera alors semental ou viande d’abattoir!
Décider en un instant, après seulement deux minutes de présence en piste, le destin d’un taureau et peut-être même d’un élevage, est une responsabilité énorme. Et c’est là que le mayoral a besoin que la chance l’accompagne.
Finalement, Gavilán, sorti en 3º position, marqué du nº 17, un beau chorreado*, bien armé et fin de type a satisfait le mayoral, l’éleveur et … le matador! Cette unanimité est assez rare pour la signaler. Il a confirmé lors d’une lidia* intégrale, les qualités entrevues à la pique.
Après quelques jours de soins, Gavilán retrouvera la liberté et ses frères. Ce n’est que l’hiver prochain qu’il sera réuni avec une vingtaine de vaches de ventre. Ses premiers enfants naîtront à l’automne 2011 et ses premières filles seront testées au printemps 2013. Ce n’est qu’alors, si ce test s’avère satisfaisant, que le mayoral décidera si Gavilán peut entamer une carrière d’étalon. Patience, vous avez dit patience!

Comportement des erales :

1/ Almejito, nº 24, 2 piques en restant. Cherche la querencia* de la porte principale.
2/ Trolero, nº 16, contourne le cheval à deux reprises.
3/ Gavilán, nº 17, 5 piques, planté sous le cheval, en poussant droit, de bas en haut, mettant les reins. Placé à la cape, 2 piques supplémentaires, de loin, galopant droit, la tête au sol. Prompt.
Muleta : met bien la tête. Noble. Beaucoup de fixité. Gueule fermée. S’est amélioré en cours de faena. Mugissement retenu de brave. Brave et noble.
4/ Fervoroso, nº 13, se défend au châtiment. Bouge la tête et fait "chanter" l’étrier.
5/ Buenavista, nº 30, mugissement de plainte. Coups de pattes en l’air. Manso*.
6/ Entendido, nº 14, 4 légères piques en fuyant.
7/ Granero, nº 27, mugissement de plainte. Cherche à contourner le cheval. Manso.



Eral : taureau âgé de 2 à 3 ans

"Que dios reparta suerte" : “Que Dieu répartisse la chance”. Dicton que l’on se souhaite avant un événement taurin.

Chorreado. Chorrear : dégouliner. Robe de taureau, où des traces marrons “dégoulinent” le long des flancs de l’animal depuis la colonne vertébrale.

Quemar : brûler. Au campo, toréer un mâle qui ne pourra donc plus être utilisé en arène.

Lidia : ensemble des phases du combat du taureau en arène. Lidiar : toréer.

Querencia : refuge. Notion fondamentale, au campo et en piste. Terrain où le taureau se sent plus à l’aise.

Faena : passes de muleta qui précèdent et préparent la mise à mort de l’animal.

Manso : lâche, peureux. Peut vouloir aussi dire malin.

dimanche 28 mars 2010

Journées Finca Mirandilla

Photo Gallardo
Deux dates sont proposées à la Finca Mirandilla, dans la ganadería du Marquis d'Albaserrada, aux aficionados français présents à Séville pour la Féria et désireux de passer une matinée de campo :

Samedi 17 avril et Lundi 19 avril





Programme :
Accueil par le mayoral de la propriété
Explications générales sur le processus d’élevage du taureau durant cinq années
Présentation de l’histoire de l’élevage de la famille des Marquis d’Albaserrada
Visite des parcs à taureaux en tracteurs/remorques
Maniement de bétail dans les champs par les vachers
Tentadero (test de sélection) de 2 génisses
Visite des installations, écuries, sellerie, arènes privées, corrals, musée du taureau, salle de trophées, maison privée des propriétaires, …

Apéritif

Déjeuner champêtre


Horaires :

De 10h30 à 16h30


Renseignements et inscriptions :

Stéphanie Torrito : storritofromluna@free.fr

Inscription possible jusqu'au 12 avril .

mercredi 24 mars 2010

Versión española V : Los filósofos

Anatolia, Turquía, hace 10.000 años. Neolítico. El nómada se hace sedentario. Aprende a modelar la piedra y la arcilla, puede fabricar herramientas de trabajo. Se convierte en agricultor. Necesita fuerza para tirar de su arado. Tiene por costumbre cazar un bóvido muy voluminoso, de capa cárdena que vive en la estepa vecina. Decide entonces domesticar este animal para utilizar su potencia en su tarea agraria. Se trata del primer intento de dominación del hombre sobre un bovino salvaje.

Para templar su carácter y hacerlo apto a la doma, realiza la ablación de sus testículos. El toro así capado se convierte en un … buey. Esta costumbre es frecuente hoy en día: capones o jacas, son consecuencias de orquiectomías.

El buey es un animal imprescindible en las fincas. Labra la tierra, tira de los carros, engorda para ofrecer suculentos solomillos, … y encima no se queja nunca de este brutal cambio de condición. Bien es verdad, que desposeído de testosterona, como se iba a enfadar?

En el campo, el buey es el elemento pacificador en los cercados y el guía que canaliza la ira de los bravos. La manada de mansos los rodea desde los tiempos dónde las bestias iban andando para lidiarse, recorriendo cientos de kilómetros por las veredas reales. Conocido como cabestro (de cabeza), puede ser berrendo en negro, en colorado, cárdeno, ensabanado, …

Sócrates es hijo de una vaca mansa berrenda y de un toro bravo de Albaserrada. Es de capa negra zaina. Es un cruzado. De media-casta, su temperamento no es idóneo para la lidia. La decisión del mayoral esta tomada: se convertirá en un buey de faenas.

La intervención veterinaria fue un éxito. Aprovechando la anestesia, se marcó con el hierro de la casa, se le despuntó los pitones y se le colgó un cencerro al cuello. Los vaqueros necesitan ahora un año para inculcar su papel al manso. Primero conocer su nombre, luego obedecer a las voces para entrar en un corral, salir de un cercado, recuperar un toro huido, …

Con Aristóteles y Platón los dos bueyes, berrendo en colorado, de experiencia de la finca, seguro que este filosófico trío va a traer sobre Mirandilla la serenidad que necesita.

mardi 23 mars 2010

Des cornes à Mojón gordo



Je ne passe pas un jour, dimanches et fériés inclus, sans m’y rendre. Et même très souvent deux fois dans la journée. Cette zone de Mirandilla s’appelle Mojón Gordo, que l’on peut traduire par Grosse Borne, à cause d’une borne cadastrale en granit qui délimitait les parcelles des fermes et qui se trouve au centre de l’enclos.

Les cent hectares s’étendent sur deux paysages bien distincts. Une partie de dehesa pure, douces collines recouvertes de chênes et oliviers et une parcelle plus plane, anciennement cultivée de céréales. Bien pourvu en herbe grasse, ce territoire est un des meilleurs de la ferme.

Depuis l’automne dernier, j’ai réuni sur ce pays une cinquantaine de mères qui sont les vaches de ventre les mieux armées de l’élevage. Une vision enchanteresse, un régal pour les yeux : du berceau, du bois, des ramures, des portemanteaux, des perches, …Que du bonheur. Si vous rajoutez à cette symphonie de cornes les pointes que Bandera, l’étalon, exhibent fièrement, vous comprenez que Mojón Gordo est un véritable paradis et mon refuge préféré.

Ici, point de fundas mais fous de pointes!

Ce mois ci, après les abondantes pluies d'hiver, les centaines d’asphodèles fleuries, perchées sur leurs hampes longilignes, créent une ambiance féerique. Héler les vaches et voir apparaître par dessus l’immense champ de fleurs blanches rosacées, ces berceaux de cornes résolument tournés vers les cieux est un spectacle dont je ne me lasse pas.

mardi 16 mars 2010

Albaserrada

Torrito et le semental Bandera
Si cela vous parle c’est que vous êtes aficionado, moi cela ne me disait rien du tout, vraiment rien.

Imaginez vous qu’un jeudi matin de début mars 2010, profitant d’une éclaircie dans une Andalousie noyée sous l’eau nous découvrons une ganaderia au bout d’un chemin bourbeux. Pourquoi y aller ? Car un nîmois, dénommé Fabrice, serait le mayoral. C’est vrai que c’est une bonne raison.
Nous arrivons donc dans un lieu déjà beau et sommes accueillis chaleureusement par Fabrice Torrito. Un peu aficionado, nous dirons aficionado débutant, nous voila plongé dans l’histoire d’une ganaderia (Albaserrada) et celle d’un homme qui a choisi il y a une vingtaine d’année de vivre à fond sa passion.

Nous voila parti dans l’histoire glorieuse de cet élevage avec le toro gracié à Séville et sa descendance, élevage aujourd’hui moins coté car la corrida a changé, dans un élevage où le toro brave était roi, où il doit le rester !
Nous voila parti dans l’histoire de Fabrice qui depuis un an est mayoral après avoir appris le métier ailleurs, où après des débuts difficiles il est sûr de sa volonté de réussir, de s’imposer, d’imposer la vérité de l’élevage, de reconquérir le public des aficionados, de ne céder à aucune mode.
Nous voila parti aussi avec Fabrice et Javier, donnant à manger aux toros et vaches dans le « campo ». Assis sur deux ballots de paille, nous découvrons les toros de deux ans, ceux de trois ans (cela s’appelle les « novillos », vous voyez je progresse…) et ceux plus gros encore.
Dans un campo « mou » (les intéressés comprendront…), la distribution de nourriture est très appréciée. Puis nous partons de l’autre côté de la route donner à manger aux vaches…
Nous découvrons alors un paysage magnifique, absolument magnifique.
Vaches, vœux et sémental (il a de la chance celui la…) nous attendent. Fabrice nous explique la sélection, l’organisation de la ganaderia et même si par moment je ne comprends pas tout je comprends que c’est un homme totalement investi dans sa passion. Quelle chance de pouvoir la « vivre ». Même si c’est parfois difficile, quelle chance de rencontrer ce mayoral, 100% nîmois, devenu 100% andalou.
Retour à la ganaderia, sélection des vaches pour la tienta, visite des lieux, discussion autour des projets de Fabrice… quelle matinée… quels moments !!!
J’avais toujours espérer visiter une ganaderia avec les toros en liberté dans de grands espaces mais là c’est encore mieux,… en vrai… quelle matinée vraiment !
Merci à Fabrice, merci aussi à Serge et Martine qui nous ont accompagnés.
Si vous allez en Andalousie, j’espère que vous vivrez un moment comme celui là…
J’en pleure en ecrivant, c’est vous dire…
Viva Fabrice et que la ganaderia de Albaserrada vive.
Merci, mille fois merci.

Eric et Marie, nouveaux adhérents au club Torrito Afición.

vendredi 5 mars 2010

Versión española IV/Trolero tiene una cita

Hoy, Trolero, toro de cuatro años, uno de los sementales de la ganadería tiene una cita importante. Los vaqueros lo llevan hacía un cercado dónde le espera un lote de unas cincuenta hembras elegidas para él. Se va a dar el lote…
Toronjito, otro semental de ocho años no ha tenido esa suerte. Murió de una parada fulminante del corazón tres días atrás. ¡Tan cerca de la recompensa! Su recuerdo permanece de todas formas en la finca ya que su sangre irriga las venas de sus más de cien crías, siendo Trolero una de ellas.

La fecha respectada para este encuentro es la Epifanía. La tradición establece que para la noche del 5 al 6 de enero, los Reyes Magos de Oriente distribuyan los regalos soñados por los niños españoles. ¡Ojo a los niños que no se han portado bien, los terribles monarcas les traerá un simple trozo de carbón!
Reunir el semental y las vacas para tan señalada fecha, es la ofrenda que el mayoral les dedica, poder reencontrarse después de seis meses de separación. En Andalucía, la época de cubrición se organiza desde principio de enero hasta final de junio. Otra fecha simbólica que se mantiene para dar por finalizada esta fase, es San Juan, esa noche del 23 al 24 de junio tan cargada de misterios.

El comportamiento del semental varía según su edad. El viejo toro sabe perfectamente que la fecha se acerca y empieza a se impacientarse. No es menester insistir, en cuanto se le abre la cancela para liberarlo, se acuerda del camino y va solo poniéndose a trotar orgullosamente hacía su harén, sin volver la cara siquiera. El joven reproductor, sobre todo si se trata de su desfloración, se debe llevar por los caballistas, guiado por los cabestros e invitado con insistencia a querer asociarse al grupo de vacas. Incluso una vez con ellas, su reflejo será de darse media-vuelta e ir buscando sus amigos los demás sementales que han quedado cerca del cortijo. El poder de seducción de una vaca dominante lo convencerá finalmente de quedarse con ellas. Una vez que haya probado, no hay quién lo quite.

Este año, a causa de las lluvias torrenciales que han caído en Andalucía, el campo está inundado. El acceso a los cercados de vacas era imposible y la fecha se ha debido atrasar. Para el mayoral, este encuentro del 20 de enero es el inicio de un ciclo que durará cinco años. Cinco largos años para llevar al toro hacía su destino final de la lidia. Sabe pertinazmente que numerosos eventos vendrán a perturbar este largo proceso. ¿Cuántas esperanzas en esta unión? ¿Cuántas dudas también? La genética es una ciencia muy caprichosa. Un padre encastado apareado con una madre de temperamento no engendra necesariamente un hijo prodigio. Solo el futuro lo dirá…

Hoy, Trolero, olvidándose de la genética y de la incertidumbre de su mayoral, empujado por un instinto trivial de lo más salvaje, se abalanza sobre su manada de pretendientes.

La naturaleza se ha puesta en marcha…

mercredi 3 mars 2010

Cher mayoral


C'est dans cette Andalousie noyée sous un déluge de pluie que nous avons débarqué à Mirandilla un matin de fin février 2010. La fange du campo était ramollie par cette incessante eau venue du ciel mais tu as quand même pris le temps de nous dépeindre la vie au cortijo, l'économie autour du Toro de Lidia ainsi que ton vrai projet pour retrouver l'origine de l'Albaserrada et lui rendre son lustre d'antan… sans oublier les soins donnés à ces bêtes avec professionnalisme et la petite Princesa adoptée par Chico.

Écouter ainsi tes commentaires avisés sans forfanterie mais pleins de sagesse nous a permis d'oublier le temps de quelques heures que depuis 50 ans cette merveilleuse contrée n'avait pas reçu autant d'eau en si peu de temps mais surtout a éclairé un peu plus notre lanterne qui rouillait forcément sous ce ciel gris foncé.

Cette idée de tendre à l'idéal en comprenant le réel me va si bien que nous avons déjà pris rendez vous, autour d'un verre de manzanilla, à Madrid sous 10 ans pour revoir ces toros qui mériteront Las Ventas sans aucun doute le moment venu…

Abrazo fuerte y suerte amigo.

Jean-Michel ANDRIUZZI

lundi 1 mars 2010

Quel avenir pour Princesa?

Le vacher a rapidement repéré le nouveau-venu dans la manade de vaches de ventre. C’est une femelle de robe negra mulata* de quelques heures de vie. Il a pu l’attraper et lui placer aux oreilles les boucles d’identification européenne. Il note sur son carnet le numéro 5727 qu’il lui assigne et qui la suivra toute sa vie. Il s’étonne cependant d’avoir trompé aussi facilement la vigilance de la maman. La vache Reina vient de vêler pour la première fois. La nature a beau être savante, cet acte n’en demeure pas moins un événement des plus déconcertants, surtout pour une primipare. Elle n’a pas été assez méfiante. Mais on ne la lui refera pas. Les vachers sont prévenus pour l’année prochaine…

Ce premier contact avec l’homme a été trop précoce. Le vacher aurait dû patienter deux à trois jours. La nouvelle-née s’est imprégnée des odeurs de l’homme et sa mère l’a rejetée. La nature sauvage est régie par des règles très strictes de survie. Que l’humain intervienne et aille à l’encontre de cette logique peut bouleverser l’équilibre naturel.

Le vacher se rend compte de cet abandon. Depuis deux jours, la vêle perdue dans la dehesa, marche sans but, amaigrie, beuglant de faim. Cette plainte l’émeut. Il réussit à l’acculer et à l’attraper à nouveau, non sans souffrir l’attaque désespérée de l’animal, tête en avant, lui rappelant que la bravoure est décidément une qualité étonnante. Il la charge sur son cheval et la ramène au cortijo*. Enfermée dans un box des écuries, elle tremble de colère, luttant contre sa nouvelle condition de prisonnière. Bien triste début d’existence pour une bête sauvage, mais il s’agissait d’une question de vie ou de mort.

Très réticente au début, il faut pourtant la forcer à accepter le biberon salvateur et employer la force. Elle est coincée entre les jambes du vacher, pouce et index introduits dans la gueule, tétine enfoncée dans la gorge. Elle ne peut comprendre que cette violence est employée pour son bien. Après plusieurs tentatives, elle goûte enfin et se délecte du bon lait tiède. L’habitude est prise. Elle vient d’effacer définitivement sa maman de la mémoire et d’adopter Chico le vacher qui lui a sauvé la vie et dont elle sait identifier les odeurs.

Princesa a maintenant deux mois. Elle a atteint une taille supérieure à celle de ses sœurs. Elle tète tous les jours six litres de lait riche et gras, alors qu’une vache de race brave en produit naturellement moins pour son veau. De plus, elle dort bien au chaud dans l’écurie, à l’abri de la terrible humidité des pluies d’hiver que ses sœurs doivent supporter dans le campo. Elle est devenue la mascotte de la ferme. Les enfants des vachers s’amusent avec elle. Courses, sauts, charges, feintes de corps, … un vrai régal, et bien plus original qu’un chiot. Par contre, impossible de la toucher. Privilège réservé à Chico à qui elle répond en beuglant lorsqu’elle reconnaît sa voix.

Dans une ambiance de franche rigolade, le mayoral sourit en observant ces scènes de jeux. Pourtant un doute l’assaille. Il sait qu’il doit bientôt prendre une décision difficile. Que faire de Princesa? Si dans deux mois la vachette n’est pas relâchée avec ses sœurs dans la dehesa, ç’a en sera terminé de sa sauvagerie. Totalement domestiquée, disparu son instinct de combativité, elle ne pourra pas, comme les autres génisses montrer son tempérament agressif à la tienta* et devenir mère de taureau de combat. Remise en liberté, le mayoral est persuadé qu’elle oublierait rapidement sa mère adoptive, apprendrait à survivre en broutant et retrouverait son instinct de bravoure inscrit dans ses gênes.

Quel est l’avenir de Princesa? La séparer de sa famille adoptive et lui faire subir un nouveau traumatisme ou la laisser devenir animal de compagnie et lui ôter son véritable destin d’animal de combat?

De belles nuits d’insomnie en perspective pour notre mayoral…



Negra mulata : littéralement noire mulâtresse. Robe fréquente de taureaux ou vaches. Noir-clair.

Cortijo : corps de logis. La partie bâtie d’une ferme.

Tienta : test de sélection de bravoure des génisses et des mâles pour devenir vaches de ventre et étalons. Tentar : tester. Placita de tienta : arènes privées de test dans les élevages.