mardi 30 novembre 2010

Le marquage de Princesa

Vous vous souvenez certainement de Princesa, la velle que la mère primipare avait rejeté et que l’on avait élevée au biberon et ainsi sauvée d’une mort annoncée (voir le blog du 1º mars : "Quel avenir pour Princesa?")

Les amis qui sont venus nous visiter à Mirandilla la connaissent. Elle se ballade où bon lui semble. Indépendante et solitaire, ont la croise dans le jardin, dans le patio, dans l’enclos des jeunes taureaux, dans les arènes, en compagnie des chevaux … Elle rentre seulement en fin d’après-midi vers le cortijo pour retrouver le confort de son box dans les écuries, où elle passe la nuit.
Combien de mains d’enfants l’ont caressée? Combien de photos ont immortalisé sa douceur? Des dizaines, des centaines … Princesa est devenue la véritable mascotte de la finca. Sa bravoure a disparu, masquée par le contact de l’homme.

En ce jour de ferrade, le vétérinaire nous confirme que cette génisse doit, comme ses sœurs, être marquée au feu. Javi, le vacher qui l’a nourrie, s’y résout, l’attrappe et, la mort dans l’âme, l’amène près du foyer. Cette trahison lui vaudra d’ailleurs une bonne semaine de bouderie de sa fille adoptive. Le bétail brave a de la mémoire!

Je suis persuadé que les brûlures sur sa peau vont réveiller le caractère de Princesa et qu’elle va lutter ardemment contre cette douloureuse injustice. Pourtant, à l’application du fer, maintenue par le seul Javi, elle se débat à peine et accepte la punition sans broncher. Elle exprime juste en sourdine un léger mugissement, comme de soumission. Quelle différence de comportement avec les autres vachettes dont la force de trois ou quatre gaillards est nécessaire pour les contraindre!
Le marquage terminé, les vachers sont sur leurs gardes en la relâchant, certains que Princesa va être en rogne et charger. Mais une fois libérée, porteur d’un superbe numéro 12 sur le dos, loin de se retourner vers nous pour exécuter sa vengeance, elle fuie en trottinant, meurtrie et offensée, vers son écurie, pour y cacher sa honte.

Aucune réaction de caste! L’acquis a gommé l’inné. L’éducation a vaincu le code génétique. La main de l’homme a inhibé le tempérament et l’a transformé en une extrême noblesse. A méditer ...

Mais l'histoire de Princesa n’est peut-être qu’une exception…

mardi 23 novembre 2010

La réforme

La vache 482, une des possibles réformées
"pas si pauvre de cornes ... "

Le mayoral s’était proposé de profiter des vaccinations d’automne pour diminuer le nombre de vaches de ventre, la situation actuelle de crise économique sévère poussant à la réduction de cheptel.
Son objectif était d’abaisser le troupeau à cent vingt cinq mères, réformant une trentaine de femelles.
Des heures d’observation engendrent la liste de mises à l’écart. Trop petites, pas assez de cornes, jamais fécondées, pas dans le type, ensellées, … autant de tares qui les éloignent de ses critères de sélection.


Les numéros des vaches recalées s’inscrivent sans dificultés sur le carnet. Tout est ok. La sévère sélection va frapper. Ce n’est qu’une question de jours.


Pourtant, une fois les vaches dans les corrals, et au moment de dire aux vachers maniant les portes, celle-ci à gauche, celle-là à droite, … un nœud lui noue l’estomac. Car dire d’un côté ou dire de l’autre signifie … vivre ou mourir.


Il se rend compte qu’envoyer à l’abattoir une génisse n’ayant pas été assez brave à la tienta, ne lui pose pas de problème, par contre en faire de même avec une vache qu’il a observé en liberté depuis des années, qu’il a vu brouter, ruminer, allaiter, proteger son veau, éduquer sa bravoure … aussi grave soit le défaut qu’elle possède, lui est insupportable!


Finalement, il annonce à l’éleveur/propriétaire :
“On élimine, en tout et pour tout … quatre vaches de ventre”
“Mais comment” lui répond ce dernier, “on avait parlé de vingt-cinq ou trente!”
“Oui, mais en fait, elles ne sont pas si petites, pas si pauvres de cornes, pas si stériles, pas tant hors-types, pas si ensellées … On peut attendre les prochaines vaccinations"


On a connu au campo réforme plus stricte!

mercredi 3 novembre 2010

Banderita est née

Exactement 285 jours après être entré sur son groupe de quarante-six vaches de ventre, Bandera, le semental du renouveau vient d'être papa pour la première fois.

Le 1º novembre, la vache Tabernera, sa promise originelle a mis bas d'une superbe velle. De robe negra mulata bragada*, ne vous fiez point de ce doux regard. Elle est la première à porter dans ses gênes l'espoir de récupération de l'élevage du marquis d'Albaserrada. Mais que le chemin est encore long ...

En faisant deux exceptions à la rêgle, j'ai décidé de déjà la bâptiser, sans attendre sa tienta, et de lui donner le nom de son père. Elle s'appelle donc Banderita. Longue et belle vie à cette nouvelle brave.


* negra mulata bragada : robe brune, sans être ni rousse ni châtain, comme fauve, au ventre blanc (de bragas, culottes)