mardi 20 décembre 2016

Les Journées Torrito Afición vues par Henri Chavernac


Jeudi 1 décembre

Il pleut sur l’Andalousie. Pour moi, paysan vigneron occitan, je sais que la terre andalouse aime cette pluie salvatrice. C’est de l’or qui tombe sur le campo, les blés, les oliviers et la vigne.

Un poulain à la belle croupe
à l'Hacienda San Felipe

Aussi la visite de l’Hacienda San Felipe me comble d’admiration. «Dis Henri, admire cette croupe andalouse me dit Pierre en prenant des photos». C’est vrai que ces chevaux andalous sont magnifiques. Mais lorsqu’il m’a parlé de leurs belles jambes, j’ai compris qu’il me parlait de la Déesse andalouse qui  caracolait sur son étalon et faisait battre son cœur.

La copita de manzanilla dans le
patio du Palais des Albaserrada.
Henri le botaniste admire le bougainvillier.


Le Palais de la dynastie des ALBASSERADA est un lieu chargé de beauté  et surtout d’histoire. Le passage dans les appartements du Marquis et surtout dans sa chambre où se côtoient les symboles de la noblesse, de l’église et de l’armée me laisse un sentiment  de malaise. 

Dans ce village de Gerena, où vivent encore des révolutionnaires anarchistes, je pense aux morts de cette guerre d’Espagne douloureuse et cruelle, à ces morts  inconnus. Je  ne porterai pas de jugement sûr les hommes de cette époque. Qu’aurait été mon attitude? Fallait-il autant de mort pour construire ces lieux magnifiques? Je remercie tous ces hommes au nom de notre génération de nous avoir légué cette Andalousie magique.

Vendredi  2 décembre

Cette année une série de veaux que l’on peut qualifier de « gordos » plus une piste bien humide et imbibée, tout été réuni pour un herradero version empoignade.

Genest à la tête et Greg
à ... la ramasse!

Comme d’habitude Serge Genest nous gratifie d’un combat et d’une technique très particulière. Pourquoi rester couché sous  l’animal? Peut-être pour éviter que la bête ne se blesse. Mais dans ce cas l’amour du taureau est poussé à l’extrême. C’est cela être toriste.

Quand à Agnès Pappalardo, dites-lui qu’il n’est pas nécessaire de badigeonner le veau dans sa totalité avec le cicatrisant. C’est uniquement la petite zone de marquage occasionnée par le fer.

Pour Greg, j’ai bien apprécié la technique de plaquage aux pattes avant, reliquat des conseils que je lui prodiguais sur les terrains de rugby. Technique que les andalous observent avec un sourire amusé et narquois.

Une partie de l'équipe de
la ferrade. Boue sur les pantalons,
synonyme de s'y être mis!

Quant à Anthony sa motivation n’était plus aux taureaux mais son esprit vagabondait à la recherche de cette serveuse andalouse de la bodega « La Essensia » ou peut-être « Le Miami ». Il semblerait qu’elle soit plutôt l’Arlésienne. Il nous a été impossible de la voir malgré une recherche nocturne sérieuse dans les bodégons de Gerena. 

Très belle prestation des Beaucairois dont certains ont une belle forme physique…


Abellán, Maruchi, el Califa de Aragua,
Fabrice et Jean-Christian.


Intéressant tentadero de trois vaches avec un Miguel Abellán artiste et technique.


Visite du campo dans la super/remorque pour admirer les taureaux et novillos que nous verrons peut-être combattre en France ...

Samedi 3 décembre 

Ce Samedi 3 décembre il pleut encore fort sur Gerena. Mais tout de même c’est le jour de la « fiesta campera » à Mirandilla. On est inquiet. Comment va être la piste. Les erales sont impressionnants pour ces jeunes novilleros de Gerena. Seront-ils à la hauteur ? Et s’il y avait un accident ? Il ne faut pas y penser

Mais les Dieux de la tauromachie aiment Fabrice. A 11 heures la pluie cesse et la fête commence. Et quelle fête !



Et là, le premier taureau est sorti. De loin on pouvait le voir arriver la tête haute, majestueux, arrogant, dans un trot lent au début, puis plus rapide pour rentrer au galop dans cette piste de la « Cerca de los franceses ». En grand Seigneur.
Après une bonne prestation, quelques frayeurs et un coup d’épée foudroyant la présidence accorde 2 oreilles et la queue au premier novillero. C’est de bonne guerre et personne ne le reprochera. C’était un vrai moment d’afición.

Jose-Carlos Benitez

Très belle sortie du toril du  deuxième  avec cette longue course pour rejoindre la piste, c’est un instant fabuleux. Fabrice il faut absolument conserver cette originalité de la sortie du toril de loin. Tour de piste pour le taureau, sûrement le meilleur des trois. Bon comportement du novillero qui coupe deux oreilles.

Derechazo de Juan-Ginés
de Gerena

Pour le troisième c’est plus le comportement du jeune de Gerena qui retient notre attention. Son attitude pouvait nous faire craindre  une charlottade. Il n’en fut rien, sa sincérité attire la sympathie, sa vérité a fait son œuvre.
Nous avons eu droit à une réplique « Morante de le Puebla » qui veut abandonner le combat après 4 mauvais coups  d’épée. C’était son jour de gloire il été heureux et nous aussi. Mais attention petit de ne pas te faire des idées.


Les Bodegas de Gerena

Toriste , toreriste ou est la vérité. Moi depuis le 3 Décembre à Mirandilla , je suis devenu : bombitoriste, tendance pipoiste. Pour ceux qui ne pratiquent pas les nuits de Gerena cela vous semble une galéjade. Permettez que je vous explique.

Quand le Bombitoriste arrive le soir à la « Bombita » bodega réputée de Gerena, il a dans sa musette si  l’on peut dire un solide bagage : un cocido avec sa pringá copieuse de chez Albasserada avec garbanzos moëlleux, gras fondant et boutifar, le tout copieusement arrosé d’un breuvage de Sanlucar de Barrameda du nom de Manzanilla, que l’on trouve merveilleux quand on le boit en Andalousie.

Il a bien sûr fait un arrêt obligatoire à la bodega «  Rociana » pour déguster, le mot est peut être enjoliveur, plusieurs verres  à 20 cts d’un breuvage étonnant  que nous appelons le « mosto ». Là on rentre en dialogue avec les Dieux puisque c’est Picasso en personne qui fait le service.

Pipo derrière son comptoir,
sans le ... perdreau!

Les Dieux nous trouvant sympathiques nous transportent chez « le Pipo » pour se désaltérer avec une  série de « cañas »frescas en compagnie de perdreaux qui piètent sur le bar laissant au passage çà et là quelques petits  souvenirs. On devient alors pipoïste quand Antonio Vizcaino, le professeur du Conservatoire de Gerena  commence à jouer  au saxo une Marseillaise d’anthologie. Là, les Dieux nous tombent sur la tête.Vous dites que  c’est les bières non, non, je vous assure ce sont les Dieux. Le pipoïste prend congé en exécutant le chant du perdreau femelle, le point fermé en cul de poule sur la bouche, le point de la main droite donnant des petits coups sur la joue gonflée.

La Bomba!

C’est l’heure du grand paseo : l’entrée dans la piste dangereuse de la « Bombita ». Quelques verres de cañas, mosto, manzanilla La Guita, Barbadillo ,vinos de toutes les couleurs pour arroser le "bacalao" frais, le secreto et autres chiperons. Les Beaucairois entonnent la Coupo Santo, nous répondons par la Font de Nîmes, le Sévillan chante une Saeta, nous répondons par « l’accent occitan ». C’est à ce moment que les Dieux font chanter à Isabel l’hymne andalou dans un silence de cathédrale. Un frisson me traverse le corps, une larme suinte au coin des paupières. Je suis devenu bombitoriste.

Fabrice! Merci pour ces journées d’aficion, d’émotions, de convivialité, de joie : le vrai  bonheur. Que c’est bon !!

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